- Green Morsel – État de l’art – Compost dans les appartements
- Green Morsel – Enquête terrain, données recueillies et Persona – Compost dans les appartements
Enquête terrain, données recueillies et Persona du projet : Green Morsel
par Mathieu BOSSART, Ethan GOIRAND, Romain LETELLIER, Abner RODRIGUES, Sheryle TOURE
I. Synthèse de l’enquête terrain
A. Rappel des hypothèses
- Hypothèse 1 : Le compostage représente la solution la plus durable pour traiter les déchets alimentaires en France.
- Hypothèse 2 : Les citadins compostent peu ou pas en raison des problèmes olfactifs liés à l’accumulation de déchets alimentaires et du manque de moyens fournis par les municipalités pour acheminer les composts d’appartement.
- Hypothèse 3 : Mauvaise gestion des emplacements des poubelles de tri dans les habitudes des citadins
B. Liste anonymisée des personnes rencontrées
Le tableau ci-dessous présente, de manière anonymisée, les personnes ayant été interviewées :
Les acteurs | Leurs caractéristiques |
Émile Rosbeef, travaillant dans un restaurant Brestois faisant une cinquantaine de couverts par service |
|
Yollande et Ivette, bibliothécaire à la PAM (Brest) |
|
Jean, responsable de la gestion des déchets à Brest métropole |
|
Christophe, Marie, Paul, Antoine et Julie, cinq citoyens habitant à Brest |
|
C. Présentation d’un compte rendu type (Q/A)
Il s’agit du compte rendu d’entretien de la personne chargé de la gestion des déchets pour la Métropole de Brest
Questions | Réponses |
Quels sont les dispositifs mis en place par la Métropole pour collecter et valoriser les déchets alimentaires ? | La métropole travaille principalement avec l’association Vert le jardin (partenaire et prestataire), notamment depuis le changement de réglementation.
Il existe deux manières de valoriser les déchets en ville :
La solution retenue, qui fonctionne le mieux pour valoriser les déchets est la méthanisation, même si elle est coûteuse. |
Observez-vous des difficultés / points bloquants avec ces dispositifs mis en place (notamment avec le compostage collectif) ? | Nous avons noté plusieurs points :
|
Au vu de ce que vous dites, la métropole n’a pas pensé à inciter au compostage individuel ? | Les composteurs individuels sont presque gratuits pour les habitants de maisons.
Cependant, il n’existe pas de solution gratuite pour ceux qui vivent en appartement, et il semble qu’il y ait des opportunités à développer dans ce domaine. Certaines initiatives sont mises en place avec les copropriétés, mais elles nécessitent qu’une personne soit responsable du composteur, car les mêmes problèmes que pour les aires collectives se posent |
D’ailleurs, pour ce qui est du compostage, savez-vous si les odeurs sont un problème ? | L’odeur est bien un problème si le composteur n’est pas équilibré. S’il est bien entretenu (remuer, ajouter des matières sèches…), il ne posera aucun souci. |
D. Synthèse des informations clés récoltées lors des entretiens
a. Émile Rosbeef, travaillant dans un restaurant Brestois
L’entretien avec ce restaurateur expérimenté révèle plusieurs aspects cruciaux de la problématique des déchets alimentaires dans la restauration. Bien qu’il reconnaisse une sensibilisation croissante au tri des déchets alimentaires dans son secteur, il met en lumière un paradoxe important : malgré une conscience environnementale personnelle, la gestion des déchets et des invendus ne constitue pas une priorité économique dans son établissement. Son témoignage souligne l’importance des incitations économiques, suggérant que la majorité des restaurateurs ne s’engageront dans le compostage qu’en présence d’avantages financiers, comme une réduction des taxes. Il pointe également une problématique concernant la saturation des associations de redistribution des invendus, ainsi qu’un manque général d’information sur les pratiques de compostage dans le secteur de la restauration.
Verbatims : “Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir en ce qui concerne le compostage des déchets pour les pros”
b. Yollande et Ivette, bibliothécaire à la PAM (Brest)
Yollande et Ivette, bibliothécaires à la PAM Ces deux bénévoles de la librairie solidaire offrent un éclairage intéressant sur les freins au compostage domestique en milieu urbain. Bien qu’elles pratiquent consciencieusement le tri des déchets alimentaires avec des poubelles dédiées, elles expriment une réticence envers le compostage à domicile. Leurs réserves s’articulent autour de deux obstacles majeurs : le manque d’espace dans leur logement et les craintes liées aux odeurs. Leur préférence pour l’utilisation des poubelles de quartier, couplée à leur désintérêt pour des formations ou du matériel supplémentaire, suggère que les solutions collectives peuvent être plus adaptées pour certains profils d’habitants.
c. Christophe, Marie, Paul, Antoine et Julie, cinq citoyens habitant à Brest
Ce groupe de citoyens engagés, âgés de 25 à 40 ans, apporte un éclairage sur les conditions de réussite du compostage urbain. Leur expérience démontre l’importance de la gratuité des équipements dans l’adoption des pratiques de compostage, tout en indiquant qu’un investissement modéré (50-100€) reste acceptable pour du matériel de qualité. Ils contestent l’idée reçue sur les nuisances olfactives, affirmant qu’un bon entretien suffit à les éviter. Leur témoignage met cependant en évidence une difficulté pratique majeure : le manque de clarté concernant la localisation des points de collecte des déchets alimentaires. Ils soulèvent également une préoccupation importante concernant les systèmes de rémunération du tri, citant l’exemple du Danemark où ces incitations ont eu des effets sociaux pervers, encourageant l’abandon des déchets pour leur collecte par les personnes sans abri.
d. Jean, responsable de la gestion des déchets à Brest métropole
Fort de ses 15 années d’expérience à la Métropole de Brest, Jean apporte un éclairage technique et pratique sur la gestion des déchets urbains. Son analyse révèle que la méthanisation, bien que plus coûteuse, s’avère plus efficace que le compostage en milieu urbain. Il identifie plusieurs défis majeurs concernant les aires de compostage collectives, notamment la prolifération des rats et la mauvaise qualité du compost due aux pratiques inappropriées des habitants. Son témoignage met également en lumière une inégalité structurelle : alors que les propriétaires de maisons bénéficient de composteurs quasi-gratuits, aucune solution équivalente n’existe pour les habitants d’appartements. Il apporte aussi une nuance concernant les odeurs, soulignant qu’elles ne deviennent problématiques qu’en cas de mauvais entretien du compost.
Verbatims : “Les rats sont un frein à l’utilisation des composteurs collectifs”
E. Conclusion partielle
Concernant l’hypothèse 1, les entretiens, notamment avec Jean de la métropole de Brest, apportent une vision plus nuancée du traitement des déchets alimentaires en milieu urbain. Si la méthanisation s’avère plus efficace en termes de traitement des volumes importants, malgré son coût plus élevé, l’enquête suggère qu’une approche hybride pourrait être plus pertinente. En effet, le compostage et la méthanisation apparaissent comme deux solutions complémentaires plutôt que concurrentes
L’hypothèse 2 est partiellement validée mais nécessite des nuances importantes. Si le manque de moyens municipaux est confirmé, particulièrement pour les habitants d’appartements qui n’ont pas accès aux mêmes solutions gratuites que les maisons individuelles, la question des odeurs apparaît davantage comme un problème lié à une mauvaise utilisation collective des composteurs que comme un obstacle technique réel. Les témoignages convergent : un compost bien entretenu ne génère pas de nuisances olfactives.
L’hypothèse 3 est clairement confirmée par l’ensemble des témoignages, avec une difficulté particulière concernant la localisation des points de collecte des déchets alimentaires.
II. Persona
Il s’agit de traduire les données recueillies au cours de la préparation de l’état de l’art mais surtout durant le travail de terrain sous la forme de profils types d’utilisateurs (aussi appelés persona).
Pour que Suzanne adopte le compostage, il est essentiel de la rassurer sur la simplicité du processus et sur l’absence de nuisances comme les odeurs ou les rats. Un dispositif léger et ergonomique, associé à un programme de sensibilisation simple et accessible, pourrait la convaincre de s’engager durablement dans la gestion de ses déchets organiques.
Pour qu’Ethaner adopte le compostage, il est essentiel de lui fournir une solution simple, rapide à mettre en place, sécurisée pour les enfants, et adaptée à la taille de son logement. Une aide au tri, un accompagnement sur l’utilisation du compost produit, ainsi que la possibilité d’impliquer ses enfants pourraient lever ses dernières réticences et encourager sa famille à s’engager davantage dans la gestion des déchets.