LEGOLIRE – Etude terrain et personas

Envoyé par le 22 Nov 2021

This entry is part 2 of 3 in the series Legolire

Auteur

Koffi Judicaël AMANI, Rose LAPREVOTE, Wael MHIMDI et Souleymane OUEDRAOGO

 

Ce document présente le déroulement de la recherche sur le terrain, la rencontre avec les parties-prenantes du projet Legolire et les personas inspirés de l’étude terrain.

 

Sommaire

Partie 1 – Synthèse de l’enquête terrain

  • Entretien avec les deux enseignantes.
  • Observation terrain : immersion dans la classe de Mme Brassor

Partie 2 – Persona

  • L’enseignante de CP, Julie
  • L’élève de CP, Simon

 

 

Nous avons débuté notre enquête terrain par la prise de contact avec différentes écoles primaires proches de l’école, c’est-à-dire qu’on a appelé plusieurs écoles en se présentant, en présentant le projet de manière très succincte, et en demandant si on pouvait organiser un entretien avec une professeure en CP intéressée par le projet. Une seule école a répondu favorablement, et nous avons mené l’entretien avec Mme Brassor début octobre.
Chaque école nous a redirigé vers une adresse mail. Nous avons envoyé le même mail à pratiquement chaque école. Pour l’école favorable à une rencontre, l’adresse mail donnée était celle de l’enseignante en CP directement, à la différence des autres, qui était l’adresse mail de la direction, qui se chargeait (ou non) de retransmettre notre mail aux enseignantes potentiellement intéressées. Nous pensons que ce qui nous a bloqué pour les autres écoles, c’est ce second intermédiaire qui rend la communication plus lente et plus difficile.
En parallèle nous avons contacté une professeure de l’école qui enseigne le français aux étudiants internationaux, nous avons fait un entretien avec elle et elle nous a redirigé vers une ex-professeure des écoles qui a enseigné pratiquement 30 ans en CP, avec qui nous avons également pu mener un premier entretien quelques jours avant de rencontrer Mme Brassor.
Nous allons dans ce compte-rendu d’enquête détailler le premier entretien avec Mme Armel, avec Mme Brassor, et notre immersion de 2 heures en fin de matinée dans la classe de madame Brassor. Cette immersion fut d’ailleurs l’occasion d’une deuxième discussion qui a en grande partie confirmé nos observations, ce sur quoi nous allons nous concentrer.

 

Partie 1 – Synthèse de l’enquête terrain

  • Entretien avec les deux enseignantes

Mme Brassor et Mme Armel

Nous allons traiter les deux entretiens en parallèle afin de mieux voir les similitudes et les divergences des enseignantes. Les deux professeures ont choisi le CP mais pour des raisons différentes : Mme Armel par goût du défit et Mme Brassor pour la routine quotidienne. Les deux enseignantes apprécient la perspective d’amélioration de leur méthode d’année en année, raison pour laquelle elles restent en CP.
Les deux ont eu des classes d’environ 20 élèves. Mme Armel avait en fait une classe de CP/CE1 et Mme Brassor une classe de CP, ce qui modifie la dynamique des classes : la première travaille plus en autonomie que la seconde, et permet aussi l’accompagnement personnalisé plus que la seconde.
Auparavant, il n’y avait aucun prérequis pour rentrer en CP, c’est-à-dire que certains élèves ne connaissaient pas leur alphabet, alors que maintenant chaque élève arrive avec une base obligatoire. Bien entendu, certains élèves en savent plus que d’autres, certains savent d’ailleurs déjà lire.
Nous avons interrogé les deux enseignantes quant au rôle des parents dans l’apprentissage précoce de la lecture. Les deux ont eu la même réponse (et différentes explications) : les parents n’ont pas tant d’influence que ça. Ils fournissent bien sûr un environnement favorable, i.e. l’enfant a des livres à la maison. Mais certains enfants apprennent entièrement seuls à lire. Les deux enseignantes ont mis en avant la motivation, la détermination personnelle de l’enfant.
Et dans le cas contraire, à savoir un enfant qui a des difficultés à apprendre à lire, plusieurs éléments extérieurs à l’école jouent un rôle aux yeux de nos enseignantes : les parents (parfois peu réceptifs aux suggestions des enseignantes, même vexés), la maison (la présence de livres ou non, ainsi que le temps d’écran), la santé.
En effet, lorsqu’un enfant a des difficultés pour apprendre à lire, l’enseignante en parle aux parents, et propose alors systématiquement de consulter un médecin généraliste, ou un ophtalmologue, ou un orthophoniste, ou encore un autre spécialiste. Les deux enseignantes n’ont aucun droit de diagnostic, elles ne peuvent qu’avoir une intuition, et la communication avec les parents est parfois épineuse. Dans le cas de Mme Armel, elle a travaillé en parallèle avec des orthophonistes pour s’adapter au maximum à l’enfant. Mme Brassor quand à elle sépare santé et école.

Maintenant que le cadre est présenté, intéressons-nous à ce qui se passe à l’école. Mme Brassor sait qu’un élève a du mal à apprendre à lire lorsqu’elle observe que certaines notions vues il y a plusieurs semaines ne sont toujours pas acquises par l’enfant. Il peut aussi passer plus de temps que nécessaire sur ses devoirs (30 minutes au lieu de 10 à 15 minutes).
Les deux enseignantes soutiennent qu’elles ont (eu) un ou plusieurs élèves en difficulté chaque année, 1 ou 2 pour Mme Brassor, et jusqu’à 3 pour Mme Armel.
Mme Brassor suit la méthode semi-syllabique imposée, elle change tout de même des choses chaque année, par exemple de manuel. Mme Armel a joui quand à elle d’une liberté totale dans l’enseignement de la lecture. La méthode qu’elle a retenu de part son expérience (c’est-à-dire la méthode qui marchait pour elle) est une méthode semi-globale : elle partait de mots pour en apprendre de nouveaux qui avaient des sons en commun, afin de ne pas se heurter aux limites de la méthode globale : l’absence de déchiffrement (i.e. de décodage).
Pour Mme Brassor, la lecture c’est du décodage et de la compréhension, accompagnés d’automatismes et de vocabulaire. Pour Mme Armel, les clés de la lecture sont la mémoire et la concentration.
Pour nos deux enseignantes, le pire des cas pour un enfant qui a du mal à apprendre à lire, la chose à éviter, c’est la démotivation de l’élève.

  • Observation terrain : immersion dans la classe de Mme Brassor

Immersion dans la classe de Mme Brassor

C’est d’ailleurs l’élément le plus marquant de notre immersion réalisée fin octobre : les deux enfants en difficulté identifiés par Mme Brassor se sont montrés totalement inactifs et désintéressés pour certaines activités de groupe (par exemple lire tous ensemble des syllabes affichées au tableau) : ils ne regardaient pas, se contentaient de répéter ce que leurs camarades disaient sans essayer.
On notera que ces deux enfants en difficulté étaient placés derrière un enfant avec une AVS (auxiliaire de vie scolaire). Elle les a parfois aidés à se concentrer. Ils étaient côte à côte pour que Mme Brassor n’explique pas les activités adaptées deux fois et aussi pour qu’ils s’entraident.
Lors de notre immersion nous avons constaté que Mme Brassor mêle écriture et lecture sur deux heures chaque matin à la même heure (la fameuse routine). Les exercices de lectures sont parfois individuels et parfois collectifs. Leur difficulté est croissante : syllabe, mot, phrase, petit texte. Ils apprennent un nouveau son à chaque séance (pour la nôtre c’était “è”, “ê”), et ils apprennent en plus des mots outils. Avant de commencer à lire une phrase, l’enseignante entoure avec les élèves les mots outils qu’ils connaissent déjà, pour qu’ils n’aient à décoder que les mots restants. La difficulté des élèves est pour la majeure partie dans la compréhension : on les a entendus lire des phrases parfaitement, puis Mme Brassor leur a demandé “Est-ce que tu as compris ce que tu as lu ?” et la réponse a toujours été négative. Après quoi elle leur explique.
On a compté 10 activités différentes en 2 heures de temps, ce qui donne 12 minutes par activité en moyenne (ce chiffre est à relativiser, certaines étaient évidemment plus longues que d’autres) : ça va vite, parce que les enfants au bout d’un moment se désintéressent si l’activité dure trop longtemps ou si la difficulté est trop grande pendant trop longtemps. Et alors ils commencent à discuter entre eux et se déconcentrent. Ils ont d’ailleurs eu 2 activités en autonomie totale (pendant lesquelles Mme Brassor commence par aller voir les élèves en difficulté, et leur a parfois adapté les fiches et les exercices et leur réexplique le ou les exercices), dont une à la fin des deux heures donc après c’était l’heure du déjeuner et le problème de brouhaha des élèves ayant fini l’activité ne s’est pas posé. Mais, pour la première activité en autonomie, les élèves qui ont fini avaient des jeux en autonomie à faire en attendant les autres. De même, ils parlent entre eux, ils discutent pour savoir qui jouera à quoi et comment on joue, ce qui fait beaucoup de bruit et lorsque les autres ont fini, l’enseignante passe du temps à calmer les enfants et à recommencer à travailler : on observe le manque d’autonomie dont elle nous a parlé en entretien.
Une fois les élèves partis on a pu voir sa réaction face aux exercices des élèves en difficulté pour apprendre à lire (et aussi pour apprendre à écrire dans notre cas). Même si elle a adapté les exercices pour ces deux élèves, pour les cibler au maximum et enlever les difficultés secondaires (par exemple donner des étiquettes à coller au lieu d’avoir à écrire), certains exercices n’ont pas été réussi, d’autres oui. Elle s’intéresse aux mécaniques comprises pour pouvoir continuer à travailler avec.
On a surtout retenu qu’il fallait que les élèves en difficulté soient impliqués physiquement dans les exercices, qu’ils aient quelque chose à faire de manière individuelle, sinon ils laissent le travail aux autres et se démotivent presque immédiatement.

 

Partie 2 – Persona

Les personas présentés se rapprochent plus de nos principales cibles (enseignante de CP et élève de CP). Concernant le persona enfantin, nous n’avons pas fait d’interview d’enfant. Aussi le profil imaginé provient des dires des enseignantes interviewées, de nos interprétations de l’immersion dans la classe et de nos représentations personnelles. Le persona de professeure des écoles est selon nous assez représentatif de Mme Brassor.

 

L’enseignante de CP, Julie

 

L’élève de CP, Simon

 

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